Excellence, cheval, Italie, les trois mots-clé de ce roman ado où règne une ambiance poisseuse, alourdie par les non-dits et l’abus.
Camille Emmanuelle fait partie des féministes au discours ouvert, inclusif avant la mode, naturellement positif et inspirant. Autrice d'essais pertinents, souvent drôles et toujours vifs, elle vient de publier "Le goût du baiser" aux éditions Thierry Magnier dans la jeune collection "l'Ardeur", et de lancer une collection "SexAppeal", aux éditions Anne Carrière. Féministe, naturellement, Camille Emmanuelle, a le bon goût de défendre le SexAppeal avec naturel et intelligence.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire du Young Adult ?
Cela faisait un moment que j’avais en tête – et en notes- l’histoire d’une jeune fille qui perdrait d’un coup le sens du goût et celui de l’odorat, et des répercussions de cet incident sur sa vie amoureuse et sexuelle. Cela faisait aussi un moment que j’avais envie d’écrire pour les « plus jeunes ». Avec Sexpowerment, j’ai eu des retours de lectrices et lecteurs de 20, 25 ans, mais pas plus jeunes. Qui lit des essais à 16 ans ? Et donc quand Charline Vanderpoorte, éditrice chez Thierry Magnier, m’a contactée pour me parler de sa nouvelle collection de romans ados/young adults, L’Ardeur, au sein desquels le corps et les sexualités sont des sujets centraux, je me suis dit que c’était enfin l’occasion de me replonger dans mes notes, et de donner corps à mes personnages encore balbutiants. J’aime bien les voir comme des squelettes, à qui j’ai donné de la chair !
Pensez-vous que ce genre littéraire puisse avoir une fonction dans la construction identitaire des ados ?
Bien sûr ! Comme tout roman d’ailleurs. Mais il est vrai que la littérature young adult mettant en scène des jeunes personnages, le lectorat peut plus facilement s’identifier à ceux-ci. Les thèmes qui sont explorés - l’identité, la quête de soi, l’amitié, l’amour, sa place au sein des autres, mais aussi les épreuves, les doutes, la résilience et dans le cas des romans de L’Ardeur le corps, le plaisir, le sexe - sont des thèmes centraux de la vie ado et jeune adulte. Parce que c’est le moment où on découvre tout ça, où on est globalement totalement paumé. S’accrocher à des personnages, au sein d’histoires fictives, aident à se sentir moins seul(e), moins chelou(e).
Quels sont les messages qui vous tiennent à coeur et que vus souhaitez transmettre aux jeunes adultes et grands ados ?
J’ai pris beaucoup de plaisir à défendre des idées « féministe sex-positive » dans mon roman, mais de tenter de le faire de la façon la plus subtile possible : à travers la narration, les dialogues entre mes personnages, leur parcours. Mon corps mon choix ; non le clitoris n’est pas un « petit bouton » ; l’idéal de beauté féminine n’est pas forcément celui des Instagrameuses taille 34 ; la virginité n’a rien de sacré ; c’est plus qu’ok de se masturber ; on peut vivre un moment de sexe bien bien naze sans en être traumatisée toute sa vie ; il faut être à l’écoute de son corps et de ses sensations ; sont quelques-uns des messages qui traversent le roman. Mais je ne les « balance » pas ainsi, elles viennent de la réflexion de mes personnages, elle-même issue de ce qu’ils traversent comme épreuves.
Vous avez par ailleurs lancé une collection chez Anne Carrière, quel est son but ? Quels sont les livres que vous allez publier ?
Oui, je lance une collection nommée « Sex Appeal ». En tant qu’auteure et journaliste sur les questions de sexualités depuis plus de dix ans, je pourrais légitimement être blasée. Je pourrais mais non ! Il y a encore des mots, des textes, des articles, des nouvelles, qui excitent mes neurones. Qui me stimulent, qui me troublent ou qui me font rire. Sur la proposition des éditions Anne Carrière, j’ai donc sollicité, avec beaucoup de joie, les auteurs de ces textes, pour qu’ils publient dans « Sex-Appeal ». Des essais, des documents, des récits, des nouvelles et des non-fictions sur le sexe, les sexualités au pluriel, l'amour, la séduction, le genre, et la culture porn.
Les plumes de Sex-Appeal, souvent journalistiques, toujours incarnées, nous offrent une autre vision, très contemporaine, du sexe, du corps, des fantasmes, voire même –soyons folles – du sens de la vie sur Terre. Le premier livre, sorti le 10 janvier, est signé par la grande Maïa Mazaurette et s’appelle Sortir du trou. Lever la tête. La première partie du livre est un pamphlet contre la pauvreté de notre imaginaire sexuel. On retourne le livre et on a la deuxième partie, une nouvelle grammaire érotique. Une ars erotica optimiste, pratique, ambitieuse, centrée sur la fantaisie et l’éthique. Le deuxième, qui va sortir en mars, est signé par le journaliste gonzo Michael Petkov-Kleiner. Il s’appelle Le rôle fondamental du plombier dans le porno. Et autres enquêtes sexuelles. Je ne vous en dis pas plus. A part que je n’ai jamais autant ri de ma vie à la lecture d’un ouvrage sur le sexe.