Excellence, cheval, Italie, les trois mots-clé de ce roman ado où règne une ambiance poisseuse, alourdie par les non-dits et l’abus.
Quand on lit beaucoup, beaucoup, beaucoup, il paraît qu’on aurait tendance à se répéter. Que l’on parle facilement de « super maison », « éditeurs génial », « démarche passionnante ». Est-ce notre faute, à nous lecteurs, journalistes, s’il existe de belles maisons d’éditions que nous prenons plaisir à défendre ? Voyons ce qui se lit chez les éditions Mirobole, super maison bordelaise inscrite dans une démarche originale, et qui m’a interpellée il y a des années déjà…
J’ai vu…
Des couvertures graphiques. Ma librairie bordelaise préférée met en avant une maison que je découvre en furetant dans les coups de coeur, reconnaissante au libraire de faire son travail avec soin. Je ne connais pas la maison, et je connais encore moins les auteurs que je devine slaves, grecs, nordiques, orientaux ou parfois anglo-saxons. Sur les couvertures, des objet où le titre du livre est comme inscrit au gros pinceau. Bottes, chaise, animal, assiette, barque, pistolet à eau, canard de bain… Un objet en gros plan, toujours selon la même déclinaison, avec le titre et le nom. Même en n’ayant aucune idée de qui sont ces écrivains, l’envie est là.Tiens, il existe donc une maison qui joue avec les codes visuels de la pop culture en ayant l’air de proposer une littérature bien écrite ? Tiens donc… Beaux et intelligents, ces livres ? Décalés et intéressants ? On verra bien !
J’ai lu…
Une littérature vivante, absurde, sensible, créative, barrée, inédite. Je n’avais aucune envie de découvrir une littérature autre qu’américaine par le biais de polars scandinaves (comme beaucoup de monde, c’est trop facile), ni d’épopées iraniennes sinistres ou de romans sociaux lituaniens. Non, ce que j’avais envie de lire, c’était des polars polonais, de l’anticipation russe, des moldaves aussi cinglés que les gitans dans Snatch, des zombies qui se battent pour leurs droits, des errances métaphysiques dans Prague… Le fantastique et le loufoque chevillés au quotidien, l’originalité des angles narratifs unie à une profondeur d’écriture certaine. Sans arriver à le formuler, je cherchais une littérature subtile, qui parle de notre époque sans nous coller à la réalité, qui s’en éloigne, même, mais sans la renier. Aurais-je trouvé le parfait équilibre ?
J’aime…
La qualité éditoriale que je retrouve au fil des ans et des lectures. Sans jamais abandonner ce clin d’oeil pop, Mirobole Editions déploie une ligne éditoriale… sans ligne éditoriale ! La petite équipe préfère parler de « style éditorial », reflet des goûts et des valeurs de la maison : curiosité, rencontres, ponts, traductions, migrations culturelles… Les livres de chez Mirobole vivent. Sous leurs airs d’objets graphiques, un sang vif circule. Ils transmettent un mouvement permanent, une agitation au creux du monde. Ils disent quelque chose de l’époque, du pays qui les a vus naître.
Pour enrichir le paysage, une nouvelle collection vient tenir compagnie aux Horizons Pourpres de l’étrange et aux Horizons Noirs du polar : Horizons Blancs, inaugurée par le lancement de La Mort du Deuxième chien, de Marek Hlasko, génial et flamboyant auteur au destin d’étoile filante et baptisé le Kerouac Polonais (et très peu connu en France). Déjanté, cruel, cynique, vivant, ce roman réussit le tour de force de s’inscrire totalement dans l’univers Mirobole en apportant une subtile différence d’univers : rien n’est ni totalement blanc ni totalement noir en littérature… Surtout avec un auteur comme celui-ci. Un écrivain prolifique et reconnu, voyageur et ancien chauffeur routier, proxénète occasionnel qui a fui le communisme aussi vite que possible. Sans oublier un air de tombeur qui lui vaut le surnom de « James Dean Polonais ». James Dean + Kerouac = Hlasko, mort d’un bête mélange d’alcool et de somnifères. Le rock’n’roll polonais, sans doute !Chez Mirobole, les écrivains se répondent, les styles se complètent, et notre culture de lecteur avide et curieux ne trouve rien à redire.