Excellence, cheval, Italie, les trois mots-clé de ce roman ado où règne une ambiance poisseuse, alourdie par les non-dits et l’abus.
Comment une maison d’édition indépendante, spécialisée dans la littérature étrangère et, qui plus est, Européenne, procède-t-elle pour dénicher les titres qui viendront enrichir son catalogue ? Nadège Agullo, fondatrice de la maison éponyme, revient sur les différents stratégies qu’une éditrice met en œuvre pour faire voyager les livres d’une langue à l’autre, pour contribuer à « abolir les frontières ». Plongée dans les coulisses de la cession de droits littéraires.
Avant de fonder votre maison, vous étiez responsable de la cession de droits pour plusieurs maisons d’édition, qu’est-ce qui vous plaît dans cet aspect du métier ?
J’ai travaillé environ 10 ans pour une maison d’édition anglaise en tant que responsable de la cession de droits. J’ai été en charge de différents territoires : l’Europe de l’est, la Scandinavie, l’Italie, la France. Puis chez un éditeur français 3 ans où j’étais là en charge du monde entier. Cela m’a permis de voyage beaucoup et de visiter ces pays et de découvrir énormément quant à leur culture, histoire et littérature.
Comment repérez-vous un livre à l’étranger ? Quels sont vos systèmes de veille et alerte ?
Nous avons plusieurs façons de procéder : en rencontrant les agents, les éditeurs ou même les centres des livres étrangers, ce peut-être également des traducteurs qui nous présentent des titres ou nos auteurs qui nous parlent de confrères. Nous restons également attentifs aux remises du prix EUPL (Prix de Littérature de l'Union Européenne). Nous avons déjà publié trois auteurs ayant reçu ce prix. Nous pouvons également décider de cherche un territoire spécialement et recherchons nous-mêmes les livres qui pourraient nous intéresser. Nous n’avons pas en soi de système de veille ou alerte pour la recherche de titre
Ensuite, comment se déroule l’étape de l’achat des droits à proprement parler ?
La procédure est la même que nous contractions avec un éditeur agent ou directement avec l’auteur. Nous proposons une offre constituée d’une avance sur droits payable à la signature du contrat, puis des droits en palier selon les quantités vendues et un partage des ventes au tiers (poche, audio, etc)
Qu’est-ce qui déclenche particulièrement l’envie de traduire un texte, de le défendre ensuite sur un marché totalement différent, de prendre des risques ?
Il nous est souvent arrivés d’être le premier éditeur à traduire un titre à l’étranger, ce qui nous donne à espérer que la traduction en français pourrait ouvrir d’autres marchés ensuite.
L’ouvrage que nous sélectionnons est avant tout un ouvrage que nous aimerions lire en français. Pour le catalogue Agullo cet ouvrage doit nous raconter le Monde, le monde de là-bas, il doit être ancré dans un territoire, européen surtout, il doit nous raconter le pays, l’histoire, la situation politique, la géographie, la gastronomie, etc, ce qu’on recherche en somme ce sont des textes immersifs.
Qu’est-ce qui fait qu’un livre « prend », comme « L’Eau Rouge » de Jurica Pavicic, par exemple, qui a remporté de nombreux prix ?
Dans notre secteur de l’Edition il y a toujours une part de hasard, et là pour ce roman croate, nous avions prévu un premier tirage très prudent puis cela s’est emballé, c’était là le premier roman noir croate à être publié en France, un roman qui nous amenait à la fois au cœur de la région dalmate, de son histoire, au cœur d’un drame intime d’une famille et au cœur du drame national d’un pays avec en fond, la guerre de Yougoslavie. C’était un voyage dans les lieux et le temps. La plume de l’auteur est également très particulière, très délicate et le traducteur Olivier Lannuzel a fait un excellent travail sur cette traduction.
Vous représentez par ailleurs cet auteur. Qu’est-ce que cela représente comme type de suivi et de travail ?
Oui nous avons proposé à l’auteur Jurica Pavicic de le représenter à l’étranger car nous échangeons régulièrement avec des éditeurs étrangers. L’auteur se représentant seul (sa maison d’édition croate n’avait pas de département de droits étrangers) et il ne connaissait pas bien les marchés étrangers alors que nous oui. Le livre paraitra est paru depuis en Slovaquie, Ukraine, Lettonie, et est en traduction pour le marché anglais.
Vous avez édité plusieurs auteurs lauréats du Prix de Littérature de l'Union Européenne (EUPL), comment s’est déroulé cette sélection de titres ? Envisagez-vous d’en publier d’autres ?
Nous avons édité jusqu’ici 3 auteurs gagnants de l’EUPL. Nous avons découvert ce prix car nous avions acheté les droits d’un premier roman d’une autrice germano-polonaise, Magdalena Parys et « 188 mètres sous Berlin » et avons à ce moment-là découvert que son 2ème roman « Le Magicien » venait de gagner l’EUPL. C’est cela sui nous a mené à déposer un premier dossier auprès de Creative Europe- Literary translation. Nous restons attentifs aux nouveaux prix EUPL.