Excellence, cheval, Italie, les trois mots-clé de ce roman ado où règne une ambiance poisseuse, alourdie par les non-dits et l’abus.
Incidents de vie
Joie, joie joie! Avec "Incident sur la 10e Avenue", Mark Safranko est de retour en français (car nous sommes un peu trop paresseux pour le lire en VO, avouons-le) !
On connaissait et adorait Mark pour ses titres parus chez 13e Note, la saga de l’intenable Max Zajack, avatar d’un auteur touche à tout et complètement disjoncté. On avait découvert le talent théâtral de Mark avec Minable, une pièce parue chez E-Fractions. Mais on ne connaissait pas, à moins d’avoir sauté l’océan et plongé dans ses lectures non traduites, l’étendue de sa plume.
Et quelle plume ! Quel talent ! Quelles nouvelles ! En 10 textes, Mark Safranko s’inscrit dans la lignée des grands nouvellistes américains, avec une touche particulière. IL a un don : celui de saisir la pensée de ses personnages de façon unique. Les trajectoires qu’il décrit, un mari adultère qui revient penaud au domicile conjugal, un homme qui retrouve par hasard un ancien amour, un type qui hésite à céder aux avances d’une strip-teaseuse, un autre qui cède aux propositions d’une prostituée douteuse et autres situations à la fois rocambolesques et quotidiennes, toutes sont écrites du mmmm lieu : celui de l’humanité doublé de sincérité. On a l’impression d’entendre un copain nous raconter ses péripéties, sa vie, ses hésitations et les plans pourris dans lesquels il est encore allé s’empêtrer pour dix milles bonnes ou mauvaises raisons. On a aussi l’impression qu’il pourrait s’agir de nous, de nos hésitations, de nos faiblesses, de nos moments d’égarement ou de lucidité.
Mark SaFranko ne décrit pas des losers, pas des mecs paumés en quête de repères ou d’identité. Il décrit des gens comme vous et moi, comme lui, peut-être. Des gens qui vivent et font des conneries, des gens qui s’interrogent et parfois font preuve de plus de bon sens qu’on ne s’y attendrait. Bref, Mark emporte et ravit, une fois de plus, encore plus, même. Son style frappe fort dans ce genre si exigeant et trop peu respecté de ce côté de l’Atlantique. Un éminent critique dont j’ai oublié le nom a écrit un jour qu’on jugeait la qualité d’un écrivain à ses textes courts (ou peut-être ai-je tout simplement fabulé cette idée, donc merci de m’en attribuer la paternité) : alors, Mark SaFranko est un grand écrivain !
Incident sur la 10e Avenue
Mark Safranko